Connu comme enseignant du module d’ergonomie par les étudiants de l’IFMK de l’École d’Assas, Frédéric Srour est aussi le président de la commission nationale « Éthique et Déontologie » du Conseil National de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes (CNOMK). À ce titre, nous lui avons demandé de nous expliquer en quoi la déontologie participait de l’avenir de la profession et quel était son regard sur la réforme des études.
Pour résumer le sens de son activité libérale et de son engagement professionnel, Frédéric Srour cite volontiers une phrase empruntée à l’un des maîtres qui l’ont marqué, Joël Barthe, l’un des pères de la kinésithérapie respiratoire : « La connaissance ne vaut que si elle est partagée. » Qu’il s’agisse de son activité de praticien, spécialisé dans les pathologies de l’épaule (pour lesquelles il est expert auprès de la Haute Autorité de Santé et vice-président de la SFRE), de son activité de formateur (en formation initiale comme continue) et d’auteur (il a signé plusieurs articles pour des revues scientifiques et un guide illustré sur la prévention des mauvaises postures au travail comme dans la vie quotidienne) ou de son action au sein de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes, comme Conseiller national et Président du Conseil départemental de Paris, Frédéric Srour n’entreprend en effet rien qui ne soit destiné à être publié, partagé, commenté.
Rien de plus naturel pour lui, donc, que de nous accueillir à l’issue d’une journée de travail au Conseil de l’Ordre pour nous parler de déontologie professionnelle. En effet, le Code de déontologie qui régit l’exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute s’applique aussi aux étudiants en IFMK. Cela est stipulé expressément à l’article R. 4321-52 : « Les dispositions des sous-sections 1 et 2 du présent code sont également applicables aux étudiants en masso-kinésithérapie mentionnés à l’article L. 4321-3. Les infractions à ces dispositions relèvent des organes disciplinaires des établissements et organismes de formation auxquels ces étudiants sont inscrits. » Qu’il s’agisse des « Devoirs généraux des MK » (sous-section 1) ou des « Devoirs envers les patients » (sous-section 2), chaque étudiant kiné est donc tenu de lire, relire et faire siennes ces quelques pages consultables ici.
La Commission éthique et déontologie du Conseil de l’Ordre, par les travaux qu’elle soumet au Conseil national de l’Ordre, participe – et c’est l’un de ses aspects les plus méconnus – à la définition du périmètre d’activité de la profession. Par exemple, elle a co-rédigé un « Guide d’information et de prévention contre les dérives thérapeutiques » qui regroupe et présente les avis déontologiques pris par le CNOMK contre des pratiques sans fondement scientifique, ou non encore vérifiées scientifiquement. En luttant contre ces pratiques parfois à la limite de la croyance ésotérique voire du charlatanisme, comme la kinésiologie (avis 2013-03), la commission d’éthique et de déontologie contribue à renforcer la respectabilité scientifique de la profession.
En contrepartie de ces avis négatifs, la Commission propose au Conseil national de l’Ordre d’émettre des avis positifs qui confirment, voire ouvrent, de nouveaux champs d’intervention aux kinésithérapeutes. Récemment, deux avis importants ont été votés par les élus du COnseil national, l’un rappelant que les kinésithérapeutes ont le droit de pratiquer les manipulations vertébrales, qui ne sont donc pas l’exclusivité des ostéopathes (ici) ; l’autre exposant qu’ils sont autorisés à pratiquer l’échographie, une discipline qu’il est donc parfaitement licite et légitime d’investir (ici). Bref, une partie de l’avenir professionnel des étudiants passe par le travail de cette Commission à laquelle Frédéric Srour se consacre avec enthousiasme.
Comme membre des instances de la profession, Frédéric Srour a suivi de près la réforme des études de masso-kinésithérapie. Pour lui, au-delà de l’universitarisation, le véritable enjeu de la réforme de la formation initiale c’est l’apprentissage de la réflexion clinique et de l’esprit critique.
« Je l’observe comme formateur et comme représentant de la profession : qu’ils soient étudiants ou en activité, les kinésithérapeutes sont en quête de savoir technique au point, parfois, de ne rien considérer d’autre. Or, il est essentiel que nous sachions, tous, construire et soutenir un raisonnement clinique pour justifier des protocoles que nous mettons en œuvre. L’objectif ultime, c’est que chaque kinésithérapeute soit, demain, à même de concevoir son programme de rééducation et surtout de le justifier. Cela bouleverse certains professionnels que le raisonnement clinique inquiète, et qui se sentent plus rassurés derrière une prescription médicale détaillée. C’est souvent parce qu’ils n’y ont pas été préparés, ni formés. Mais avec la réforme des études, cela doit – et va, j’en suis convaincu – changer. »
« Ce que nous avons obtenu avec la réforme, c’est de passer du statut de technicien à celui d’ingénieur. Et pas simplement parce que le cycle d’études est désormais sur 5 ans, comme tous les Masters, mais surtout, parce que le raisonnement clinique est maintenant reconnu dans le programme des études. Le kinésithérapeute du XXème siècle était un exécutant technicien, celui du XXIème siècle sera expert, clinicien, et ingénieur en santé, comme le prévoit notre nouvelle définition inscrite au Code de la santé publique (art. L. 4321-1). »