Pédicure-podologue diplômée en 2015 de l’IFPP de l’École d’Assas, Pauline Perrin est partie quelques temps plus tard en remplacement outre-mer, plus précisément à Mayotte, dans l’Océan Indien. Ce qui ne devait être qu’une parenthèse ensoleillée loin du périph’ est devenu finalement un pari professionnel compliqué mais prenant dans une île où l’offre en matière de soins de santé a du mal à suivre la croissance démographique de la population. Voici son témoignage.
Après mon diplôme, en 2015, et après quelques remplacements à droite et à gauche, j’ai eu envie d’allier voyage et boulot. Retenue pour un remplacement de congé maternité, me voici partie pour 6 mois – du moins c’est ce que je croyais – à Mayotte ! Le remplacement est un peu houleux : une grève générale, pas de voiture donc du stop et des taxis à tout va… Il faut savoir que l’île connaît de grosses difficultés de développement (économique, aménagement du territoire, etc.) et est souvent le lieux de manifestations (insécurité, immigration clandestine). Mais à coté de cela c’est plage, cocotiers, soleil, lagon et dauphins. Bref, j’apprends à découvrir l’île et adore l’expérience.
Au bout des 6 mois, la titulaire m’annonce que le cabinet est en vente et qu’elle quitte le territoire…
Investir dans un cabinet à 8000 km de mes proches alors que le remboursement de mon prêt étudiant court encore ? Non, trop de risques. Mais le prix de rachat étant faible, je finis par me laisser tenter et, hop !, me voilà titulaire du cabinet. Ledit cabinet est situé à coté de la mosquée de Tsoundzou 1 et est composé d’une secrétaire médicale, de 4 infirmiers, d’un kinésithérapeute, d’une acupunctrice et de moi. L’île est peu riche en personnel soignant (en libéral surtout) mais le travail pluridisciplinaire y est très facilité étant donné que tout le monde se connaît, ce qui est un plus pour les patients.
En pédicurie-podologie nous ne sommes vraiment pas beaucoup et les relations sont très bonnes. En matière de formation, c’est très compliqué : la Réunion est le pôle le plus proche mais le coût de l’avion est un frein pour en profiter pleinement… J’ai tout de même pu réaliser une formation en réflexologie que je mets depuis en pratique au cabinet. De temps à autre, nous sommes conviés à des réunions de l’ARS ou à des forums sur les métiers.
Depuis 2016 nous sommes inclus dans un projet de dépistage conduit par la MSA (Mutuelle Sociale Agricole) qui dépiste tous les ans, durant un mois, les agriculteurs et leur famille à Mayotte sur divers sujets : diabète, conditions de vie/travail, maladies cardio-vasculaires, diététique, hygiène dentaire, gynécologie, etc. À Mayotte, et dans les DOM TOM en général, la proportion de diabétiques est supérieure au seuil national. Ma patientèle comporte ainsi environ 1/4 de diabétiques qui sont de grade 2 ou 3 dont un sur deux ayant subi une amputation. Ici, le rapport à la maladie n’est pas du tout le même qu’en métropole et l’un des enjeux essentiel du praticien qui s’installe est de bien s’adapter au contexte culturel local.
Pauline Perrin